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"Fragments d'histoires"
Résidence de création à l'inventaire artothèque Hauts-De-France - Lille Hellemmes 2022-2023
Puis à la Malterie décembre 2023 et à La Condition Publique en 2024.
Projet soutenu par la Bourse de la région Hauts-De-France

 

A tâtons.

On entre là avec dé-li-ca-tes-se…le corps s’arrête, les gestes ralentissent, la voix baisse d’un ton. Dans ce labyrinthe en reconfiguration, on avance à tâtons (…)

 

Camille Gallard, en nouant ces éclats de verre brisé, met en scène l’humble qui pend aux décisions venues d’en haut. Elle nous convie, non à l’image mais à ses détours et déplacements de poétique en politique selon une déambulation qui prend le temps, laisse du vide et rend les espaces, réels, imaginaires et symboliques. L’ensemble n’est pas donné, juste des fragments épars, des ferments d’inconnus et tout un soupçon d'éclosions. Elle travaille comme ce pêcheur de perles dont parle Hannah Arendt “avec les éclats de pensée” qu’[elle] peut arracher au passé et rassembler autour de soi”. George Didi-Huberman rappelle l’importance de ce geste qui ne prend pas, n’expose pas, ne met pas sous cloche mais recueille et “convoque l’imagination” : “Mais si nous marchons dans un paysage de détritus ou de cendres, alors, je le répète, il faut creuser la cendre pour ramener à la surface - en soufflant dessus délicatement, tendrement - les petits fragments de braise que la catastrophe aura oublié d’éteindre tout à fait. Cela s’appelle une recherche du temps perdu (et non, strictement, une recherche du temps passé). Cela s'appelle convoquer l’imagination : comme souffler sur quelques simples braises pour rendre aux temps présents, aux gestes, aux formes, aux langues, leur fondamental désir de désobéir1”.

Hélène Konkuyt

Fragments d’histoires

 

    Durant une résidence de recherche et création, menée avec l’artothèque l’Inventaire dans le cadre du projet de réhabilitation de la Chapelle d’Elocques à Hellemmes, j’ai recueilli durant plusieurs mois (de janvier à juin 2022) la parole des personnes travaillant sur ce chantier mais surtout celles des locataires de ces logements historiques directement impactés par la transformation de leur quartier. Construites après-guerre et protégées au Patrimoine, ces habitations connaissent depuis 2020, d’importants travaux prévus jusque fin 2025. 

 

    Durant quelques mois, je filme peu avec ma caméra, parfois un micro enregistre, on m’autorise à prendre des notes. J’écoute les récits. Je vais ouvrir doucement les petites fenêtres sur les histoires des habitants de ce quartier, poser un léger voile sur le regard afin de ne pas bousculer. Quelque chose vient se dire autour de la perte. Celle de son logement, ses repères, ses voisins, ses habitudes, sa mémoire. En collaboration étroite avec la chorégraphe Sabine Anciant, certains ont accepté de participer à des recherches de mouvements avec les cartons et les projections de photos d’archives collectées.  C’est tout une partie de leur histoire, de leur vie et l’on me dira même « ces murs c’est comme une seconde peau pour moi ». On imagine alors facilement la difficulté de partir, même si c’est pour revenir quelques mètres plus loin.

 

    Cette pudeur, ces émotions partagées avec les habitants, et cette retenue, m’ont invitées à faire des pas de côté dans ma pratique artistique.

 

    De retour à mon atelier, durant plusieurs mois, je vais « Trier, Ranger, Classer, Eliminer, Jeter » comme nous dit si bien Georges Perec. C'est comme si j’avais récolté pleins de morceaux d’un miroir brisé, ça coupe si on les prend mal, on n'arrive pas à refaire un objet complet.

A partir de ce constat, je vais produire plusieurs installations : photographiques, sonores et une vidéo autour du fragments. Ces créations donnent accès à des éclats ou des reflets de ce que les habitants traversent. Elles créent des dialogues, travaillant autour du passé, la mémoire qui se troue, l’arrivée de la modernité.

Lors du vernissage Sabine Anciant a proposé une performance, voir même une activation des oeuvres de l'exposition. C’est à dire qu’avec son corps elle produit des mouvements et donne une nouvelle lecture aux installations. Elle est accompagnée d’Adrien Fontaine qui a réalisé la musique pour la performance et la vidéo. 

Création : Camille Gallard 

Murs Murs 

Installation photographique 2023

Camille Gallard

 

    Je crée un mur de cartons qui devient support précaire de projection. Volontairement, je laisse des brèches entre les cartons, ce qui empêche une lecture complète des images projetées.

 Ce sont des documents historiques des habitants du quartier de la Chapelle d’Elocques, collectés durant plusieurs mois : des photographies des années 50, 60, 70 évoquant une autre époque : une télévision, des personnes qui posent devant les fenêtres de la rue Pierre Curie, un jardin ouvrier, des rues sans voiture, des enfants sur une place qui n’existe plus….

 

Ces signes du passé et l’image ne suffiront pas, la modernité est arrivée et avec elle, on a fermé les portes, les fenêtres, on sécurise, les écrans ont pris le dessus.

 

Cet écran là tente de proposer une autre lecture. 

A un fil

Installation photographique 2023

Camille Gallard

 

    Au plafond, pendent des fils transparents auxquels sont accrochés des dizaines de petits cadres de verres : fleurs séchées, poussières, morceaux de tapisseries, toiles d’araignées, cadre vide parfois brisé, quelques morceaux de photographies d’un quartier, d’une histoire. 

 

    Le corps du spectateur s’engage avec délicatesse dans l’espace d’exposition, il doit éviter de heurter les cadres fragiles. Il est invité à ralentir son rythme, prendre soin de ces gestes pour pénétrer l’espace à travers les trente suspensions.

Je vous invite ainsi à regarder des détails oubliés, des traces du passé,Je vous propose une lecture parcellaire de l’histoire de ce quartier qui rend le spectateur actif dans son imaginaire. 

Réhabilitation, fragments des discours  

Prototype Installation sonore 2023

 

Durée : 40 min

Conception et réalisation : Camille Gallard 

Ingénieur son : Adrien Fontaine  

Comédien.ne.s : Sylvain Cornet, Anais Gheeraert, Francois Jacquemin, Hélène Konkuyt, Maité Laude, Solange Parenty, Frédérique Rheims, Timothé Spriet, Dominique Steinberg, Armelle Tybou.

Partenaires : L’inventaire artothèque Hauts-De-France, Le Flow- La Ville de Lille, la Malterie.

 

 

Cette installation sonore est un prototype. 

Un second temps de travail est prévu à partir de la rentrée 2023-2024 afin de poursuivre les interviews puis concevoir et fabriquer des assises pour accompagner le spectateur dans l’écoute de l’oeuvre. 

 

    Cette installation épurée est composée d’un système de quatre enceintes qui enlacent l’espace. 

Le spectateur peut entendre les voix diffusées d’une enceinte à une autre, recréant ainsi un dialogue imaginaire entre les différents protagonistes de la réhabilitation. Celui-ci est immergé dans les fragments des discours des uns et des autres.  À travers les voix de onze personnes, la pièce met en jeu ces fragments de discours qui témoignent et donnent à entendre des voix que l’on entend peu.

 

    Que signifie pour chacun quitter son logement, que représentent les objets, les souvenirs ? Les paroles des habitants soigneusement choisies, prendront corps par les voix "de lecteurs" dans une installation sonore. 

Il s'agit de donner à entendre des morceaux de récits, différentes voix qui se répondent ou se heurtent entre ceux qui veulent rester, ceux qui apprécient les nouveaux logements, ceux qui sont perdus mais aussi ceux qui travaillent sur la réhabilitation.  

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